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Vous avez trouvé une tortue exotique dans votre jardin? Attention, il peut s'agir d'une espèce dangereuse

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Vous avez trouvé une tortue exotique dans votre jardin? Attention, il peut s'agir d'une espèce dangereuse

Actualité locale
Publié le 11/03/2020 - Mis à jour le 11/03/2020

Vous avez trouvé une tortue exotique dans votre jardin? Attention, il peut s'agir d'une espèce dangereuse

Avec la découverte d'un reptile agressif chez des particuliers à Tourves, le village des tortues de Carnoules a rappelé les risques que représente l'abandon de certaines espèces dans la nature.

Une tortue agressive capable de déployer en un éclair son cou et de broyer le doigt d'un humain. La description de cet animal pesant 10 kg, retrouvé il y a quelques jours chez des particuliers à Tourves, en a amusé plus d'un.

Et pourtant, l'adjoint de direction du Village des tortues, à Carnoules, Stéphane Gagno, prend le cas très au sérieux: "Ça aurait pu mal tourner. On croit souvent qu'une tortue est empotée, mais c'est un animal malin. Il en existe plus de 360 espèces et beaucoup d'entre elles sont dangereuses."

 Le reptile, une centrochelys sulcata omnivore "à grosse tendance carnassière", peut atteindre 60 kg et fait partie des animaux non domestiques dont la vente est contrôlée par l'État .

ABANDONS FRÉQUENTS

Bien souvent mignons jeunes, ces animaux non domestiques peuvent devenir très encombrants une fois adultes. Poussant parfois leurs propriétaires à les délaisser. Des abandons ou négligences fréquents, comme le relève Stéphane Gagno: "Nous sommes sollicités tous les jours par des personnes qui retrouvent des tortues ou veulent s'en séparer. En moyenne, nous recevons 200 demandes par mois. Nous avons 1 400 individus au Village des tortues, dont 90 % sont issus d'abandons."

Concernant la centrochelys sulcata, Stéphane Gagno dénonce une "aberration" qu'il a constatée par le passé: "J'ai vu, sur internet, une annonce de vente indiquant "tortue au look préhistorique facile à nourrir". Des gens achètent des animaux sans savoir comment ils évoluent, c'est consternant", déplore-t-il.

DANGEREUX POUR L'ÉCOSYSTÈME

Problème, l'abandon d'espèces exotiques dans la nature peut déséquilibrer l'écosystème dont elles ne sont pas originaires: "Le fait de relâcher ces animaux exotiques en milieu naturel constitue le 2e facteur de disparition des espèces locales. De plus, ça fait des géniteurs en moins dans les milieux d'origine de ces animaux", insiste Stéphane Gagno.

Qui ajoute: "Dans le cas de la centrochelys sulcata, c'est inquiétant, car c'est une espèce qui est menacée."

Par souci de préservation, le Village des tortues continue de recueillir les animaux. Mais malgré l'agrandissement en cours d'un enclos, le refuge de Carnoules arrive à saturation de sa capacité d'accueil.

RAPATRIER DANS LE MILIEU D’ORIGINE

gonfaronretour des tortues au senegal

L’une des solutions pour éviter de laisser des espèces exotiques se balader dans la nature est de les transférer dans leur environnement d’origine.

Ce fut le cas au Village des tortues, qui, en 2015 a rapatrié 150 chéloniens à Madagascar. Puis ce furent 35 reptiles qui retrouvèrent le Sénégal en 2016: "Elles sont prises en charge sur place pendant plusieurs années afin de se réadapter à l’environnement. Un suivi médical est fait pour voir si elles vont bien, avant de les placer dans des réserves naturelles", détaille Stéphane Gagno.

INFORMER POUR PRÉSERVER LA FAUNE

Pour pallier les possibles méconnaissances des acheteurs, une loi sur l’obligation des vendeurs d’informer les clients est actuellement en projet.

Pour acquérir certaines espèces non domestiques, dont fait partie la centrochelys sulcata, un acheteur doit être en possession d’un certificat de capacité. Ce document est délivré par la préfecture et permet de s’assurer que l’acquéreur a les connaissances nécessaires pour s’occuper de l’animal.

Pour l’obtenir, il faut d’abord faire une demande à la Direction départementale de la protection des populations. Si le dossier est jugé recevable, le demandeur passe devant une précommission composée d’experts. Puis en commission, où il est testé sur des connaissances: biologie des espèces, modalités d’élevage ou encore statut des espèces.

Sur avis de cette commission, le préfet délivre ou non le certificat. En moyenne, dix sont octroyés par an dans le Var. Autre aspect, l’obligation pour un vendeur d’informer l’acheteur.

Cette notion, introduite en 2017 via la loi sur la biodiversité, sera complétée dans les mois à venir. L’article 10 du projet de loi, en consultation publique, prévoit plusieurs points: "Toute vente d’un animal vivant d’une espèce non domestique doit s’accompagner au moment de la livraison d’un document d’information présentant: - le nom scientifique et commun de l’espèce; - sa longévité; - sa taille adulte; - son mode de vie sociale; - son comportement; - son mode de reproduction; - son régime alimentaire et la ration quotidienne; - les conditions d’hébergement; - toute information complémentaire jugée utile pour garantir la satisfaction des besoins physiologiques et comportementaux."

Membre du groupe de travail interministériel chargé de ce texte de loi, Stéphane Gagno espère que les abandons seront diminués: "On se bat pour sensibiliser les gens aux conséquences de l’abandon d’espèces sensibles."